vendredi 30 avril 2010

Mange, prie, aime d'Elizabeth Gilbert

A trente et un ans, Elizabeth possède tout ce qu’une femme peut souhaiter : un mari dévoué, une belle maison, une carrière prometteuse. Pourtant, elle est rongée par l’angoisse et le doute. Un divorce, une dépression et une liaison désastreuse la laissent encore plus désemparée. Elle décide alors de tout plaquer pour partir seule à travers le monde ! En Italie, elle goûte aux délices de la dolce vita et prend les « douze kilos les plus heureux de sa vie » ; en Inde, ashram et rigueur ascétique l’aident à discipliner son esprit et, en Indonésie, elle cherche à réconcilier son corps et son âme pour trouver cet équilibre qu’on appelle le bonheur… Et qui n’a jamais rêvé de changer de vie ?

Ce roman est une bouffée d'air frais, un roman/thérapie qui fait du bien à l'esprit et qui nous rappelle que l'important dans la vie est de se sentir en paix avec soi-même, en harmonie avec ce qui nous entoure. C'est un témoignage très touchant que nous livre Liz, avec simplicité et honnêteté, le tout raconté avec beaucoup d'humour.

L'histoire nous est racontée sur un ton de confidence et une complicité s'installe d'emblée entre l'auteure et son lecteur. Pour ma part, plus je tournais les pages, moins j'avais envie de terminer le livre. J'aurais voulu rester en compagnie de cette jeune femme charmante qui, à bout de nerfs et malade d'anxiété décide de changer de vie et de reprendre le contrôle d'elle-même. Au cours d'une année à l'étranger, d'abord en Italie, puis en Inde et enfin en Indonésie, Liz réapprendra à croire en elle-même et fera de nouveau confiance à la vie.

Le livre est divisé en trois parties, chacune consacrée à un pays, et désignée par un mantra qui a donné son titre au livre: Mange, Prie, Aime. Au fur et à mesure de son récit, nous en apprenons plus sur Liz et sur ce qui l'a conduite à un tel état de détresse physique mais surtout psychologique. Un mariage qui ne la rend pas heureuse, le divorce difficile qui a suivi et qui l'a brisée, une nouvelle histoire d'amour compliquée, passionnelle mais ingérable ont conduit notre héroïne à faire des choix et à retrouver cette parcelle d'amour propre soigneusement enfoui, malmené et qui semblait jusque là voué à le rester.

Les mois qu'elle passe en Italie sont placés sous le signe du plaisir. Liz décide d'apprendre l'italien et se perdre dans les méandres mélodieux de la langue est pour elle l'un des plus beaux cadeaux qu'elle se fait à elle-même. Pendant quatre mois, elle goûte aux plaisirs de la nourriture italienne, des pizzas qu'aucun adjectif n'est susceptible de décrire, des glaces à toute heure, bref, comme elle le dit elle-même, ce sont les douze kilos les plus heureux de sa vie. La deuxième période est placée sous le signe de l'introspection, et se déroule dans l'ashram de son guru (à ne pas prendre dans le sens péjoratif du terme) en Inde. Liz apprend alors à prier la "divinité qui est en elle". Elle goûte à la pureté du silence et aux bienfaits de la méditation, épreuve qui ne fut pas toujours facile pour elle. En Indonésie, elle tente de concilier l'art du plaisir et l'art de la dévotion pour trouver l'équibre fragile qu'est le bonheur aux côtés d'un sorcier balinais Ketut Liyer.

J'ai trouvé ce récit poignant et spontané tout en étant incroyablement intéressant. Nous flânons dans ces trois pays en compagnie de Liz (et des amitiés qu'elles se forgent sur place) qui nous les fait découvrir avec un regard plus novateur et moins conventionnel que d'ordinaire. Découvrir un pays de cette manière est vraiment agréable et me donnerait (presque) le goût au tourisme sauvage (le temps d'une seconde). La spiritualité est au coeur du roman et Liz parvient à nous donner envie de s'y essayer, à apprendre à se couper du monde dingue qui nous entoure et à trouver la bonne fréquence pour harmoniser son corps et son esprit. Certains passages peuvent paraître plus longs, notamment en Inde où la méditation a ses hauts et ses bas mais chacune de ces 500 pages fut pour moi un régal. J'ai adoré la période en Italie, pour ses plaisirs à profusion mais aussi parce qu'elle marque la renaissance de notre héroïne et le début d'une quête de soi touchante et généreuse.

J'en ai déjà parlé mais un film éponyme sortira dans nos salles en septembre avec dans le rôle de Liz, Julia Roberts. Et la BA est très très prometteuse.

Elizabeth Gilbert, Mange, prie, aime, Le livre de poche, 506 pages, 2009

mardi 27 avril 2010

La communauté du sud: Quand le danger rôde (tome 1) de Charlaine Harris

Les vampires vivent désormais parmi les humains grâce à un substitut leur permettant de se nourrir sans tuer. Mais la méfiance règne toujours à Bon Temps, petite ville de l'Amérique profonde. L'arrivée de Bill, ténébreux vampire va bouleverser la vie de la jeune serveuse télépathe, Sookie, d'autant qu'une vague de crimes s'abat sur la ville.

Bon, une chose est certaine, ici, on ne joue pas dans la cour de la grande littérature mais la série ne prétend pas non plus en être. Je m'attendais à quelque chose de léger, qui me détende et qui se lirait vite. Pour le coup, le défi est relevé parce que c'est bien ce que ce premier tome m'a apporté, mais rien de plus. Je ne pense pas qu'à la base le style de Charlaine Harris soit extraordinaire mais je pense vraiment que l'histoire y gagnerait à être lue en anglais. Parce que j'ai trouvé la traduction de ce premier tome mauvaise, des phrases alambiquées, du jargonnage, des adjectifs mal choisis qui tombent comme un peu comme un cheveu sur la soupe. C'est maladroit et le récit en pâtit. Je pense donc poursuivre en VO.

L'histoire en elle-même est plutôt chouette et originale. Pas tellement pour son intrigue policière qui n'est qu'un prétexte mais pour son idée d'intégrer les vampires dans le quotidien de notre société; c'est innovant et ça permet d'insuffler un gros plus à l'histoire. Et puis, c'est une métaphore bien trouvée sur notre capacité (ou non) à intégrer la différence, ce qui est loin d'être gagné pour le coup - ben oui, être destitué de son rôle de prédateur, ça en fait flipper plus d'un. Les vampires ne doivent plus se nourrir de sang humain et peuvent désormais vivre grâce à du sang synthétique. Evidemment, beaucoup préfèrent garder leurs anciennes habitudes. Ainsi, ils se nourrissent encore sur des volontaires (ou non). Le sang de vampire est aussi consommé par les humains comme substance illicite hallucinogène et comme stimulant sexuel.

Le récit est centré autour de Sookie Stackhouse, une jeune femme un peu spéciale puisqu'elle a le don d'entendre les pensées des personnes qui l'entourent. Quoique parfois trop naïve et niaise sur les bords, Sookie ne demeure pas moins un personnage auquel on s'attache vite. Elle ne manque pas d'humour et nous fait passer un très bon moment. L'un des autres personnages principaux est Bill, on le devine, le futur amoureux de la belle. Je suis bien plus réservée en ce qui le concerne. Je l'ai trouvé fade, au mental au ras des pâquerettes parfois et obsédé. De nombreux autres personnages dont je ne citerai qu'Eric (aka the viking vampire), on ne le rencontre que peu mais c'est de bonne augure (:p - je l'aime beaucoup dans la série aussi).

Harris installe le tout dans une atmosphère très harlequinesque mais un peu d'eau de rose n'a jamais tué personne (quoique). Une lecture sympathique donc, rapide et probablement (très certainement même) meilleure en anglais.

Charlaine Harris, La communauté du sud Tome 1, J'ai lu, 314 pages, 2009

jeudi 15 avril 2010

Les Penderwick: L'été de quatre soeurs, de deux lapins et d'un garçon très intéressant de Jeanne Birdsall

Véritable coup de coeur! Il fait partie de ces livres qu'on lit avec volupté comme on déguste un chocolat chaud. Il est rempli de douceur, se lit rapidement et est sans conteste l'une des meilleures sources de réconfort que j'ai connue jusqu'ici. Cette petite pépite de 250 pages environ nous donne un avant-goût des vacances à venir, non sans évoquer la nostalgie de notre enfance.

Le roman jeunesse de J. Birdsall nous fait nous replonger au coeur de notre enfance en nous racontant les aventures estivales de quatre soeurs: Rosalind, Skye, Jeanne et Linotte. Orphelines de mère, elles sont élevées par leur père, professeur de biologie un peu dans la lune. Il s'exprime souvent en latin et ne vit que pour ses filles et ses plantes. Cette année, les filles ne passent pas leurs vacances au même endroit que les années précédentes et on sent comme une vague d'inquiétude envahir l'ambiance générale. Vont-elles autant s'amuser? L'endroit que leur père a choisi saura-t-il répondre à leurs attentes? Vont-elles rencontrer des personnes sympathiques?

Arrivés à Arundel, on se répartit les chambres et l'exploration peut commencer. C'est alors que Skye rencontre Lucas, le jeune garçon habitant l'imposante demeure dont les Penderwick occupent le pavillon. Cette première prise de contact se solde par une bosse sur la tête et quelques mots maladroits. Une RSP (réunion des soeurs Penderwick - il y a aussi les RAP: réunion des ainées Penderwick) est convoquée... il faut absolument que le mal soit réparé. L'idée est géniale, je suis sous le charme de ce quatuor aux membres aussi disparates qu'unis.

Les personnages de J. Birdsall sont adorables. On ne peut que les aimer, avec une petite préférence pour Jeanne qui est particulièrement imaginative. Elle rêve de devenir écrivain et son héroïne Sabrina Starr est absolument exquise! Rosalind, l'aînée est un véritable socle, surtout pour Linotte, la plus jeune qui souffre d'un manque maternel. Rosalind lui permet d'établir une connexion avec sa mère en lui racontant des anecdotes passées. On s'imagine Linotte comme un petit papillon (elle porte toujours de fausses ailes sur le dos) en communion avec la nature. En effet, c'est la seule capable de comprendre le langage chien de Crapule (le chien Penderwick) et d'amadouer les lapins de Thomas, le jeune jardinier qui s'occupe du domaine. Skye est la plus singulière: de nature franche, elle se met souvent dans des situations fâcheuses. Le plus atypique est qu'elle trouve que la résolution de problèmes mathématiques est très divertissante! Lucas est passionné de musique, il est de nature douce, compréhensive et très courageuse. On l'adore! Tous les personnages sont chaleureux, spontanés et drôles. Il n'y a que Mme Tifton, la mère de Lucas et son fiancé l'affreux Denis qu'on aime moins. Mais quel plaisir on prend à les détester en compagnie des Penderwick!

Birdsall évoque différents sujets comme les premiers sentiments amoureux, la jalousie, la culpabilité, l'importance de l'imaginaire, le deuil, la communication au sein de la famille, le lien extraordinaire qu'est celui de l'amitié... Elle ponctue son récit de situations désopilantes au cours desquelles il est impossible de ne pas tomber amoureux de ses personnages. Bref, un dépaysement total. J'ai ADORE. Et puis, les soeurs Penderwick ne sont pas sans rappeler les quatre fills d'un certain Dr. March! Hâte de découvrir le tome 2 qui est sorti en anglais...

Jeanne Birdsall, Les Penderwicks (tome 1), Pocket Jeunesse, 251 pages, 2008

dimanche 11 avril 2010

The Jane Austen book club de Karen Joy Fowler

Dans la vallée de Sacramento en Californie, Bernadette, Jocelyn, Sylvia, Prudie, Allegra et Grigg forment un charmant club de lecture avec pour objectif la lecture des six romans principaux de Jane Austen. Un roman par mois et une réunion chez celui ou celle qui avait été "désignée" pour le titre en question. All Jane Austen all the time.

L'idée est géniale, non? Et comme l'adaptation du roman figure parmi mes films préférés (et donc vus un nombre indécent de fois), lire le roman était incontournable. Et la couverture, avec une couverture comme celle-là - AUCUN moyen de résister ! Et pourtant, j'en ressors mitigée. Je n'ai jamais vraiment réussi à entrer dans le roman. Disons que c'est une lecture relativement plaisante mais qui ne me restera pas longtemps à l'esprit.

Le thème principal, Jane Austen, m'a laissée sur ma faim. Dire qu'on ne parle pas d'Austen serait faux mais je m'attendais à davantage être plongée dans l'univers de la romancière, de retrouver l'ambiance de ses romans à la place de quoi j'ai trouvé parfois l'atmosphère glauque et surfaite. Le découpage des chapitres en fonction des romans était une idée à la fois simple et sympathique mais qui ne fonctionne pas vraiment au final. On découvre tour à tour les personnages dont l'auteur nous raconte quelques anecdotes. Certaines sont sympathiques à découvrir, d'autres font plus office de bavardages intempestifs. Ces moments choisis de la vie de nos héros n'ont pas réussi à me captiver et je n'ai pas su vaincre la distance toujours grandissante qui s'installait entre ces personnages (que j'aime pourtant d'amouuur dans le film mais qui ont dans le roman un côté parfois crispant) et moi. C'est peut-être là d'ailleurs la force du film qui fait l'impasse sur le passé de nos héros pour ne se concentrer que sur leur présent.

Je ne dis pas que j'ai passé un "mauvais" moment, j'ai quand même eu plaisir à lire ce livre mais je ne pense pas que ça aurait été le cas si le thème principal avait été autre. Pour résumer, je dirais que j'aimais beaucoup les idées de l'auteur comme le club de lecture, Jane Austen, un choix varié de personnages et des moments choisis de leur vie pour les décrire mais au final, rien ne m'a convaincue. Et ça m'embête un peu parce que c'est comme si je "voulais" aimer ce roman, dommage... En fait, je ne ressors pas mitigée mais franchement déçue. Il me reste un autre roman de Karen Joy Fowler à lire, j'espère qu'il saura davantage me convaincre !

L'avis plus enthousiaste de Soph, ici.

Lu dans le cadre du challenge

Karen Joy Fowler, The Jane Austen book club, Penguin Books, 304 pages, 2005

dimanche 4 avril 2010

Le portrait de Dorian Gray d'Oscar Wilde

Que c'est triste ! Je vais devenir vieux, horrible et épouvantable. Mais ce portrait, lui, demeurera toujours jeune. [...] Si seulement c'était moi qui devais rester éternellement jeune et le portrait qui devait vieillir ! Pour cela, je donnerais tout ! [...] Je donnerais mon âme ! Toute l'intrigue de l'unique roman d'Oscar Wilde est en germe dans ce vœu aux accents de pacte faustien. Dorénavant, Dorian Gray ne vieillira plus : c'est son portrait qui portera les stigmates de son âge, de ses vices et de ses crimes.

Je n'avais encore rien lu d'Oscar Wilde mais quel délicieux avant-goût de son oeuvre qu'est ce roman. J'ai absolument adoré l'histoire, les personnages, l'ambiance, ce livre m'a fait passer quelques heures aussi merveilleuses qu'inquiétantes. Un gros gros coup de coeur pour cet écrivain et ses aphorismes qui sont de véritables perles adroitement dispersées par l'auteur et goulûment consommées par le lecteur!

Le portrait de Dorian Gray nous raconte l'histoire d'un jeune homme qui, simultanément, prend conscience de sa beauté envoûtante au travers d'un portrait qu'a fait de lui son ami le peintre Basil Hallward, et devient convaincu, par un ami de ce dernier, Lord Henry Wotton, que la jeunesse est tout ce qui compte. Jaloux de la jeunesse éternelle du tableau qu'il a entre les mains, il émet le souhait insensé de rester lui-même toujours jeune et séduisant et de faire subir au tableau les affres de la vieillesse. Dorian Gray n'a alors pas conscience que le voeu qu'il vient de formuler s'est réalisé... Ce n'est que lorsqu'il rentre chez lui après avoir cruellement renié Sibyl Vane, une jeune actrice dont il croyait être amoureux, qu'il constante un léger changement dans le tableau. L'expression paraissait différente. On eût cru qu'il y avait une ombre de cruauté dans la bouche. D'abord effrayé, il promet de se racheter mais l'influence aussi malsaine qu'envoûtante de Lord Henry jointe à l'excitante perspective de ne pas vieillir, ni même de porter le poids de ses péchés conduiront Dorian Gray vers une vie de débauche, à faire du péché une raison de vivre.

Pendant près de vingt années, Dorian incarnera la débauche mêlée à une vanité sans pareille; prenant plaisir à voir le portrait vieillir et porter le poids de ses agissements nuisibles à tous ceux qui ont le malheur de l'approcher. Rien n'est suffisant et son âme altérée le conduira bientôt au crime. La raison n'est plus, la passion ne peut s'exprimer qu'au travers de moeurs débridées et d'une vie de dépravation. Il commence à être fuit comme la peste et regardé avec dégoût mais la fascination persiste toujours. Lord Henry Wotton lui reste proche, parce qu'il exerce sur Dorian (comme sur le lecteur) une emprise inépuisable. Il dispose d'un charisme ensorcelant et on n'est jamais las de sa compagnie. Il débite à longueur de temps des théories à la fois subtiles et immorales, de véritables joyaux qui font de ce personnage l'un des meilleurs que j'ai pu rencontrer jusqu'ici. Alors que Gray peut paraître fade, influençable et parfois benêt sur les bords, Henry est d'une intelligence fine et d'un cynisme à toute épreuve, d'une insensibilité mordante et d'une répartie inconvenante foncièrement savoureuse. Une merveille qui nous fascine non sans en éprouver un plaisir coupable. Le roman vaut d'être lu, rien que pour faire la connaissance de ce personnage subtilement dérangeant.

Il rejoint sans hésitation mes livres préférés et ne fait qu'attiser ma curiosité de découvrir le reste de l'oeuvre d'Oscar Wilde.

Lu dans le cadre du challenge:

Oscar Wilde, Le portrait de Dorian Gray, Le livre de poche, 285 pages, 1972